Le 6 novembre 2025, le vieil autocrate Ismaïl Omar Guelleh a promulgué sa ‘’loi portant révision de la constitution’’. Il tente ainsi de faire avaler aux Djiboutiens son tripatouillage constitutionnel du 26 octobre 2025. Ce, pour pouvoir s’auto-réélire pour un sixième mandat illégitime. C’était l’objet du tripatouillage constitutionnel. Il a fait supprimer la limite d’âge fixée à 75 pour les candidats à l’élection présidentielle, disposition qu’il avait lui-même décidée lors de sa précédente ‘’révision’’ d’avril 2010. A la place, il a fait introduire une disposition taillée sur mesure contre son principal adversaire, Dr Daher Ahmed Farah (DAF), l’opposant historique. Comme ce dernier est rentré de son second exil en décembre 2022, l’autocrate a fait écrire : ‘’Tout candidat aux fonctions de Président de la République doit résider de façon continue (sur le territoire national, ndlr) depuis cinq années au moins à la date du dépôt de sa candidature, sauf en cas de mission accomplie pour le compte de l’État ou d’une organisation internationale’’.
Le Bloc pour le salut national (BSN), coalition des partis djiboutiens d’opposition, a exprimé son vif rejet de ce tripatouillage de la constitution. Elle l’a réitéré et continue de le faire.
Elle a aussi appelé et appelle à l’expression du plus grand nombre. Elle le fait dans ses meetings comme par ses publications. Elle appelle à une ‘’expression pacifique, responsable et respectueuse de la constitution’’.
Sa déclaration du 6 novembre 2025 en témoigne. En voici, in extenso, le texte, consultable sur la page Facebook du BSN : ‘’Comme nous vous l’avons rappelé lors du meeting du vendredi 31 octobre 2025, notre pays est en grand danger. Il est en grand danger du fait de la fuite en avant effrénée d’un vieil homme et de sa poignée de proches repus. Avec le tripatouillage nul et non avenu qu’il vient de perpétrer contre la constitution, l’autocrate Ismail Omar Guelleh cherche à mourir au pouvoir et à probablement laisser ce qui reste de nous à un membre de sa famille. Face à cette perspective tragique, nous devons agir. Nous devons nous exprimer avec la fermeté et l’énergie qui siéent à la gravité de la situation. La constitution de 1992 nous le permet. L’urgence l’impose. Chaque Djiboutienne et chaque Djiboutien doivent commencer à s’exprimer. Il s’agit d’une expression pacifique, responsable et respectueuse de la constitution. Elle peut commencer à la maison pour en sortir. Elle peut commencer à tout moment. Nous avons l’avantage de l’initiative et la force du nombre. Bien entendu, notre expression doit être portée à la connaissance du monde. Nous savons le faire avec les nouvelles technologies. Nous exprimer et le faire savoir, tel est notre mot d’ordre. Parce qu’ils sont de loin les plus nombreux des Djiboutiens et que leur avenir est gravement menacé, nos jeunes sont particulièrement concernés. Ils doivent s’exprimer en conséquence. Nous savons que lorsque la majorité populaire s’exprime, sa volonté triomphe. C’est mathématique. Jeunes Djiboutiennes, jeunes Djiboutiens, ne laissez pas tuer votre avenir. Vous êtes les descendants de fiers ancêtres. Vous êtes les héritiers d’indépendantistes héroïques et autres braves résistants à la dictature. Nous autres aînés vous avons montré la voie et continuons de le faire. Nous demeurons debout malgré les persécutions multiformes et sans fin. Je rappelle ici que mes frères Adan Mohamed Abdou et Kadar Abdi Ibrahim sont toujours privés de passeport. C’est avec l’argent public, l’argent du peuple, notre argent, que l’autocrate Ismaïl Omar Guelleh et les quelques siens se sont enrichis. Ils ont accaparé jusqu’au parc aux bestiaux de Balbala. Sans compter les opportunités qu’ils nous ont fait manquer et les ressources qu’ils ont fait perdre par d’autres canaux. Notre pauvreté est largement due aux pratiques de ce régime. Et ils veulent le perpétuer ! C’est inacceptable ! Relevons la tête ! Mettons un terme au désastre ! Faisons advenir une nouvelle ère de démocratie, de vie décente et de développement harmonieux. 49 ans de souffrances, ça suffit ! Anihay Djibouti ! Taxya Djibouti. Jabuuti ha noolato !’’
On le voit, c’est un appel national pour le salut national. Le BSN s’adresse particulièrement aux jeunes dont ‘’l’avenir est gravement menacé’’. Ce n’est pas faux. Les jeunes sont massivement frappés par le chômage, la mauvaise qualité de l’école, la déscolarisation, le déficit de formation professionnelle, l’absence de perspectives d’avenir. Au lieu de prendre soin d’eux, le régime les livre au khat, à la drogue et autre alcool frelaté. C’est un massacre programmé. L’avenir national est assassiné, car la jeunesse est le futur du pays. ‘’C’est inacceptable’’, martèle le BSN.
La coalition insiste sur les atouts du peuple face à la dictature. Elle évoque ‘’l’avantage de l’initiative’’ populaire, car le peuple peut s’exprimer à tout moment. Cela ne tient qu’à lui. Il a également la force du nombre pour lui, particulièrement la jeunesse qui représente plus de 70% de la population générale. ‘’Lorsque la majorité populaire s’exprime, sa volonté triomphe. C’est mathématique’’, souligne le BSN. Et de conclure par un poignant ‘’49 ans de souffrances, ça suffit !’’.
Cet appel semble avoir été entendu, notamment par les jeunes. Déjà, des groupes de jeunes s’expriment ici et là, dans des intérieurs. Ils s’échauffent pour l’expression à l’extérieur. D’autres appellent à des rassemblements massifs. Cela était le cas vendredi 21 novembre 2025 avec un appel à un rassemblement collectif au Stade Gouled de la capitale. C’était aussi le cas le lundi 24 novembre où les jeunes chômeurs se sont donné rendez-vous devant la Cité ministérielle pour réclamer des emplois, des vrais, non des faux.
On le devine, tout cela ne rassure pas le régime. Il a déployé toutes ses forces de l’ordre les 21 et 24 novembre 2025 pour empêcher les rassemblements. L’uniforme était partout, mais cela n’a pas empêché les jeunes de sortir.
Clairement, le BSN insuffle une dynamique positive au pays, de sorte que ce dernier commence à bouger. Comme nous l’écrivions dans notre précédente édition, le vieil autocrate Ismail Omar Guelleh a commis le viol de trop le 26 octobre 2026.