Quels liens peut-il y avoir entre la démocratie et la bonne gouvernance ? La bonne gouvernance, comme son nom l’indique, est la gouvernance dédiée au service du peuple et du pays. Elle se garde, dans sa gestion, de la corruption et autres dérives néfastes pour se distinguer par des pratiques conformes à la Loi et aux intérêts des gouvernés. Les bons gouvernants ne se servent pas, ils servent leurs gouvernés. Ils ont le sens du devoir, de la justice, de la solidarité, des responsabilités et de l’histoire. Ils sont compétents, efficaces et connaissent les réalités du pays. Dans leur discours comme dans leur action, ils encouragent, chez leurs gouvernés, les qualités porteuses telles que le goût de l’effort, le talent, le mérite, le souci de l’Autre, ou l’esprit patriotique. La bonne gouvernance relie le passé, le présent et le futur, nourrit le sentiment d’appartenance à la communauté nationale sans lequel une conscience citoyenne ne peut émerger. Elle obéit à une vision nationale qui emporte l’adhésion du plus grand nombre à défaut de tout le corps social. Elle est à l’écoute constante du peuple.
Ainsi définie, la bonne gouvernance gagne à la démocratie. En d’autres mots, la démocratie favorise la bonne gouvernance. Comment ? Par la conscience qu’ont les gouvernants de n’être que des serviteurs du peuple, non des souverains qui suivent leur bon vouloir. Dans une démocratie, les décideurs politiques savent qu’ils sont responsables devant le peuple qui les élit pour les servir. Ils savent que le peuple les regarde, réagit et sanctionne. Il les regarde dans leur action de tous les jours, dans leurs résultats qu’il compare aux promesses électorales. Il les regarde à travers les médias qui l’informent, les critiques objectives de l’opposition, les analyses et autres alertes de la société civile. S’il l’estime nécessaire, le peuple donne de la voix, descend dans la rue, revendique telle ou telle chose légitime. Dans tous les cas, il sanctionne les gouvernants aux élections, favorablement ou défavorablement. C’est dire si les gouvernant ont des comptes à rendre au peuple qui leur délègue le pouvoir d’agir à son service. C’est ce que l’on appelle le contrôle démocratique et qui fait toute la différence entre la démocratie et la dictature. Le dictateur, on le sait, s’en tient à son bon vouloir, il est au-dessus des règles. Même lorsqu’il est éclairé, il fait ce qu’il décrète bon pour le peuple, non ce que celui-ci souhaite. Le dictateur infantilise le peuple en le bâillonnant et en décidant à sa place.
Ces effets bénéfiques de la démocratie sur la gouvernance publique, des études empiriques récentes le confirment. Ainsi, un rapport de l’Institut pour les études sur la sécurité intitulé The future of democracy in Africa(www.issafrica.org) établit que la démocratie contribue régulièrement au développement, à la bonne gouvernance et à la croissance économique sur le continent. Un autre rapport du Centre pour l’entreprise internationale privée (www.cipe.org) relève que les démocraties rendent des comptes aux peuples plutôt qu’à l’élite et qu’elles sont plus susceptibles de maintenir l’État de droit et de produire de bons services publics. Autant d’observations logiques, compte tenu de la logique démocratique.
Inversement, la bonne gouvernance conforte la démocratie par ses bonnes pratiques et les valeurs sous-jacentes. En bien gérant la chose publique, en combattant la corruption et autres comportements déviants, en faisant ce qu’elle dit, en donnant du sens à son action, la bonne gouvernance raffermit la foi du peuple en la démocratie. Elle renforce sa confiance en ses vertus. La démocratie s’en trouve consolidée.
Nous pouvons en conclure que démocratie et bonne gouvernance se travaillent et se favorisent mutuellement.
On l’a vu, démocratie et libertés sont indissociables, car la démocratie n’a pas de sens sans Liberté. Et celle-ci s’exerce sous diverses déclinaisons : liberté de pensée, liberté de conscience, liberté d’expression, liberté de réunion, liberté d’association, etc. Autant de déclinaisons de la Liberté, autant de libertés démocratiques.
A cet égard, l’importance de la liberté d’expression pour l’individu comme pour la collectivité, n’est pas à démontrer. Cette liberté fondamentale s’exerce par la parole, par le langage non-verbal, par la plume, par l’image et par tout autre moyen licite.
Avec la diffusion de l’imprimerie et de l’école, la presse s’est développée en démocratie, impulsant la liberté de la presse. Puis, les médias audio-visuels sont apparus grâce au progrès technique, suivis aujourd’hui des médias en ligne, y compris les réseaux sociaux. Avec tous ces mass-médias, s’exerce désormais la liberté des médias.
La liberté de chacun s’arrêtant là où commence celle d’autrui (collectivité comprise), les libertés sont encadrées par la Loi en démocratie. La liberté des médias ne fait pas exception à cette règle. Elle doit donc se pratiquer avec conscience et responsabilité. A partir de ce principe de bon sens et de l’encadrement légal qui le traduit, la liberté des médias permet la liberté d’informer, de commenter, d’analyser, de critiquer, de proposer si possible. Concrètement, les médias rapportent les faits, enquêtant s’il le faut, parfois avec des risques. Ils essaient aussi d’examiner les faits pour les faire parler. De la sorte, ils pointent ce qui va et ce qui ne va pas, que ce soit dans la société en général, dans la gouvernance publique, dans le secteur privé ou ailleurs. Ils pointent encore des pistes de solution si leurs collaborateurs en repèrent, etc. En éclairant ainsi l’opinion publique, les médias participent à l’équilibre de la vie en société. Ils constituent, à ce titre, un contre-pouvoir.
D’où l’expression bien connue de ‘’quatrième pouvoir’’ que l’on emploie ici et là pour qualifier les médias. Les trois autres pouvoirs de l’État démocratique étant bien entendu le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire.
Voilà pourquoi le niveau de développement des médias est devenu un indicateur de la santé démocratique d’un pays. Un pays où la liberté des médias est protégée et les médias développés, est un pays où la démocratie va bien.
Le Classement mondial pour la liberté de la presse (liberté des médias, s’entend), que publie chaque année l’ONG Reporters Sans Frontières (RSF), en témoigne.
Dans ce classement de RSF, qui couvre 180 pays du monde, la République de Djibouti est au plus bas. Elle est classée 173ème sur les 180 pays en 2018. Et pour cause puisque le paysage médiatique s’y limite à la Radiotélévision de Djibouti (RTD) et au journal La Nation, tous deux contrôlés par le pouvoir en place. Le seul média indépendant, qui émet à la fois en ligne et par satellite, est La Voix de Djibouti (LVD).
Il va sans dire que ce mauvais classement de Djibouti pour la liberté des médias, reflète le lourd déficit démocratique du pays où, malgré les textes, la pratique du pouvoir d’État demeure dictatoriale.
Rappelons que, les chez les pasteurs nomades djiboutiens, la liberté d’expression prospère, notamment à travers la poésie, le débat libre et autres joutes oratoires.